Et le Selphilux fut / Reportage
Retour sur un projet artistique de territoire, accompagné par le pôle médiation de l’iddac
"Pour réaliser l’œuvre, je viendrai vous voir chez vous, parce que je vais avoir besoin de vous." Éric Blosse
Résidents/Résidences, une expérience portée par le Collectif Jesuisnoirdemonde à Lormont : un artiste investit un quartier au sein d’une Artisterie et réalise une œuvre avec et pour les habitants.
La résidence d’Éric Blosse s’est déroulée dans le quartier Alpilles-Vincennes, à Lormont entre mai et juillet 2017. Le 22 septembre, l’œuvre collective réalisée prend forme et lumière, le SELPHILUX est activé. Ambiance quelques heures avant, en bas et en haut des immeubles…
Mr Bagdad est à sa fenêtre – il tient le fil n°3, parmi les 50 qui seront tendus ce soir depuis les balcons des 3 tours jusqu’au sol, au centre. Il accroche son fil. De l’autre côté, on déroule et on tend sur le fil rouge pour venir le nouer avec les autres. M. Bagdad conseille depuis chez lui : "Attention, tirez pas trop fort ! Emmenez pas la tour ! " Toute l’équipe s’agite : "C’est bon ? C’est attaché ? Ok, ça y est, tu peux récupérer !"
Effervescence au Quartier Alpilles-Vincennes. Ce soir, c’est la première activation de l’œuvre collective. Le dispositif est simple et délicat à la fois. Les fils rouges vont former comme un bouquet de traits rouges, reliant ensemble vers le centre les trois tours. Il y a du monde ceux qui participent, les curieux, les invités, et la vie normale qui se poursuit. Parmi les voix des enfants, qui jouent là au milieu, on entend : "Il est où Éric ? "
Éric Blosse, l’artiste du projet, est partout à la fois.
Les fils rouges tendus de haut en bas représentent un réseau : celui-ci est fragile et éphémère. "Chaque fil, c’est quelqu’un. Le principe, c’est que chacun envoie ce qu’il est. "
Le projet a commencé par un travail d’observation de la lumière. "La lumière vient toujours d’en haut. Ce soir, en remerciement, elle viendra du bas et se déplacera le long des fils, jusqu’à eux, vers le haut".
Demain, samedi 23, une autre œuvre sera installée sur le même principe, mais les fils partiront de chacune des tours vers l’extérieur, côté rue. Un monsieur s’approche. C’est pour demain justement, il aimerait bien avoir un assistant pour tendre le fil, il s’inquiète de ne pas y arriver tout seul. Il observe les 50 fils déjà installés depuis le centre vers les balcons : "Les gens vont pas grimper quand même ?".
20h10. Les habitants descendent. Agitation. Éric salue tout le monde. Une jeune femme lui dit en riant : "J’explique le concept à ma copine, en marocain s’il te plaît !" Au balcon du 17ème étage, une dame a accroché des feuilles de papier : il y a écrit MERCI, précise une jeune fille, c’est ma maman qui l’a fait.
La soirée prend forme, avec les discours du Maire, et du partenaire principal, le bailleur social. À l’émotion d’Éric Blosse quand c’est son tour de s’exprimer au micro, on comprend que la réussite du projet tient au temps de fabrication : c’est-à-dire rencontrer chaque habitant des tours. Et à l’issue de ces rencontres, 1/3 d’entre eux a joué le jeu des fils. Deux mois de résidence et son implication ont permis cette réussite. Il faut vraiment voir cette agitation joyeuse ce soir. Et au fur et à mesure que la nuit tombe, la lumière se déplace lentement le long des fils rouges.
Pour prolonger : lire ici "L'apparition du merveilleux", entretien avec Éric Blosse.
Le Collectif jesuisnoirdemonde : Sophie Robin, Direction artistique
Ont participé à ce projet : Chloé Sireyx, Administration Clémence Ravion, Médiation artistique et culturelle/ Communication
Eric Blosse, Créateur lumière / danse, évènements, installations, musique contemporaine, opéra, performances, théâtre tout en essayant d’interpréter ces mots de Marcile Ficin "Arde, e non luce".
Les compagnies qu’il accompagne en ce moment : Ariadone, Eclats, Jesuisnoirdemonde, La Coma, Les Etonnistes, Ouvre le Chien, Paul les Oiseaux, Rhizome, Sandrine Anglade, Sylex.
Partenaires : l’iddac, agence culturelle de la Gironde et le Conseil départemental de la Gironde, Ville de Lormont, Bordeaux métropole, Gironde Habitat, Logévie, Mésolia, Fondation de France, Cget.
La première résidence / Artisterie s’est déroulée dans le quartier Bas-Carriet à Lormont. L’artiste numérique Stéphane Gantelet et les habitants ont réalisé un jeu vidéo artistique. Ouverture de l’artisterie du 17 février 2017 – 14 avril 2017 du mardi au vendredi de 16h à 20h et le samedi matin de 10h à 20h au PAC Point Animation Carriet, rue des Glaïeuls, Lormont.
Partenaires Résidents/Résidences sur Carriet : l’iddac, agence culturelle de la Gironde et le Conseil départemental de la Gironde, Domofrance, Mésolia, Fondation de France, Dicréam, Cget, DRAC, Ville de Lormont, Bordeaux Métropole.
@photos : Frédéric Desmesure